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L’initiative vient d’un groupe de ministres africains de l’énergie. Face aux engagements manqués en matière de financement du climat et du développement, les africains veulent prendre leur destin en main sur la question de l’accès à l’énergie et le développement des ressources en Afrique.  Un document  en cours d’élaboration par un comité technique de l’Union Africaine va être présenté aux ministres qui vont le porter aux chefs d’Etats africains  à l’occasion de la COP27 en Egypte. Pendant que les dirigeants européens font actuellement la chasse au pétrole et au gaz, notamment, le Chancelier Olaf Schoolz, l’Afrique ne peut pas prendre le risque de croiser les bras. Et pourtant, la guerre en Ukraine doit être une opportunité de s’adapter à un monde sans énergies fossiles, mais c’est le contraire qui se produit. Toutefois, les ONGs africaines sont vent debout contre cette initiative africaine qui met plus l’accent sur le gaz et l’énergie nucléaire au détriment des énergies renouvelables propres et moins chères. Elles estiment que le continent africain risque de manquer ses objectifs compromettant ainsi sa prospérité future.

Didier Hubert MADAFIME, PAMACC

Cette initiative africaine de l’accès à l’énergie fait suite au récent vote de l’Union Européenne  considérant  le gaz et les projets nucléaires comme « des projets verts », les rendant éligibles aux prêts et aux subventions à perte. Du coup, cette nouvelle règle offre aux européens l’opportunité de faire la chasse aux ressources énergétiques en Afrique. Si lors des pourparlers sur le climat  à la COP27 en Egypte, la position Européenne venait à être adoptée, cela aura des conséquences évidentes.

D’abord, un effort considérable sera déployé visant à accroitre la production du gaz en Afrique, enfermant du coup le continent africain dans les combustibles fossiles les décennies à venir. Et puis, il y a les technologies à utiliser pour ses différentes exploitations, le risque qu’elles affectent l’environnement existe comme c’est le cas dans le Delta du Niger.

La colère des militants et  ONGs contre l’initiative africaine sur l’accès à l’énergie

Elle est légitime, d’abord, parce qu’elle a été prise par les seuls ministres de l’énergie sans ceux du climat. Ensuite, elle détourne le continent de sa trajectoire d’un développement sobre en carbone.  Au-delà des inquiétudes, il y a surtout la crédibilité de la COP27 qui se joue et le respect des objectifs fixés par l’Accord de Paris sur le climat. Dans un mémorandum sur l’accès à la transition énergétique, les ONGs et militants ont fait part de leurs préoccupations.

Mohamed Adoh, Directeur de Power Shift Africa a été très clair, je cite : « L'Afrique est dotée d'une abondance d'énergies éoliennes, solaires et autres énergies renouvelables propres. Les dirigeants africains devraient maximiser ce potentiel et exploiter l'abondance du vent et du soleil qui contribuera à améliorer l'accès à l'énergie et à lutter contre le changement climatique. Ce dont l'Afrique n'a pas besoin, c'est d'être entravée par des infrastructures de combustibles fossiles coûteuses qui seront obsolètes dans quelques années à mesure que la crise climatique s'aggrave. »

« Ce serait une trahison honteuse du peuple africain, déjà en première ligne de la crise climatique, si les dirigeants africains utilisent le sommet sur le climat de la COP27 de novembre sur le sol africain pour enfermer l'Afrique dans un avenir basé sur les combustibles fossiles. L'Afrique n'a pas besoin de l'énergie sale du passé, elle a besoin d'un leadership tourné vers l'avenir qui peut tirer parti de l'énergie propre du présent et de l'avenir. »

Le Dr Sixbert Mwanga, coordinateur du Climate Action Network Africa, est allé aussi dans le même sens : « Le continent africain est doté de nombreuses sources d'énergie renouvelables de haute qualité, notamment l'énergie solaire, éolienne, géothermique, qui pourraient profiter à ses habitants. Lors de la COP27, nous appelons l'Union africaine et les dirigeants africains à annoncer l'utilisation de ces sources au profit de notre peuple et à laisser de côté le développement des combustibles fossiles pour l'exportation.

Charity Migwi, chargée de campagne régionale pour l'Afrique chez 350.org, a déclaré : « En tant que citoyen africain concerné, il est totalement inacceptable que les dirigeants africains accordent la priorité au gaz alors que des millions de personnes les plus durement touchées par la crise climatique en cours ont du mal à s'adapter aux réalités dévastatrices du changement climatique. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a averti en 2020 qu'il n'y avait pas de place pour de nouveaux combustibles fossiles. Le développement du gaz non seulement enfermerait les nations africaines dans la production de combustibles. »

« Le GIEC 2022 a averti clairement que le monde a besoin de réductions drastiques des émissions de carbone pour éviter des impacts climatiques catastrophiques. La planète a déjà connu une hausse de température et nous dépasserons 1,5 ºC d'ici 2030 et subirons une augmentation de l'intensité et de la fréquence des catastrophes climatiques, » dit Lorraine Chiponda, la coordinatrice du Africa Coal Network.

D’après Lorraine, « la perspective que les dirigeants africains présentent et font pression pour les développements et les investissements gaziers est écrasante et imprudente compte tenu des impacts climatiques qui menacent la vie de millions de personnes en Afrique après avoir vu s'aggraver les sécheresses et famine, inondations récurrentes et cyclones. »

La position commune africaine sur l’accès à l’énergie ne passe pas

Les projets de combustibles fossiles n'ont ni résolu la pauvreté énergétique en Afrique où 600 millions de personnes en Afrique vivent encore dans la pauvreté énergétique, ni apporté de justice socio-économique aux Africains. Nous continuerons à renforcer les appels en faveur d'une transition juste des peuples loin des combustibles fossiles.

Fatima Ahouli, coordinatrice régionale du Climate Action Network Arab World, a déclaré : « L'appel à une exploitation accrue et nouvelle des combustibles fossiles en Afrique est motivé par les mêmes pays affamés qui ne voient l'Afrique que comme une mine d'or. L'abus continu et insoutenable des ressources de l'Afrique contredit toute la lutte contre le changement climatique dans le monde. En fait, cela sape tous les efforts visant à éliminer progressivement les combustibles fossiles et à laisser les pays africains diriger une économie plus durable. Nous exigeons donc un arrêt de ces mentalités colonialistes qui ne font que conduire à plus de conflits et accélérer l'apocalypse de l'humanité. »

Le ton est ainsi donné à quelques mois de la conférence sur le climat prévue pour être tenue en Egypte en novembre 2022. Et comme on le voit l’accès à l’énergie risque d’être le sujet qui va dominer les débats au cours de cette messe climatique.

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